L’association affirme qu’à l’heure actuelle, le Brésil a pour chef de gouvernement et d’État un homme dont l’attitude est « totalement et absolument irresponsable ». Par conséquent, elle demande à la CPI d’ouvrir une procédure d’enquête sur la conduite du président brésilien. Elle souhaite la condamnation de Bolsonaro pour crime contre l’humanité, et appelle à des sanctions appropriées pour mise en danger de la vie des citoyens brésiliens, qu’il expose à la contagion et la prolifération du virus par ses paroles et ses actions concrètes.
« Par action ou par omission, Bolsonaro met la vie de la population brésilienne en danger, commettant des crimes propres à l’intervention de la Cour pénale internationale pour non-protection de la vie de millions de personnes », déclare le document signé par les avocats Ricardo Franco Pinto (Espagne) et Charles Kurmay (États-Unis).
Violações
Les juristes énumèrent la série de mesures prises par le président de la République du Brésil minimisant la gravité de la pandémie et contredisant les recommandations des autorités sanitaires du monde entier, y compris les directives et recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de toutes les nations qui ont été ou sont à l’épicentre de la pandémie. Parmices mesures, on trouve des déclarations favorables à la fin de l’isolement social et prônant la réouverture des écoles et des commerces ; le lancement de la campagne officielle "Le Brésil ne peut pas s’arrêter" ; des sorties publiques afin de participer à des manifestations qui ont provoqué des regroupements de population dans les rues ; et la promulgation d’un décret favorable à la réouverture des églises et guichets de loteries.
« Les crimes commis affectent gravement la santé physique et mentale de toute la population brésilienne, l’exposant à un virus mortel d’une capacité de prolifération effrayante, comme on a déjà pu le voir dans plusieurs pays. Les États qui ont négligé la politique de quarantaine sont ceux où l’impact de la pandémie a été le plus important, comme en Italie, en Espagne et aux États-Unis », précisent-ils.
Crimes
Selon l’ABJD, Bolsonaro commet ici « un crime d’épidémie » , comme prévu à l’article 267 du code pénal brésilien, et dans la loi n° 8072/1990, qui qualifie les crimes odieux. Il enfreint également une mesure sanitaire préventive, selon l’article 268 du Code pénal brésilien. De plus, il viole la loi n° 13.979 du 6 février 2020, qui traite spécifiquement de l’urgence du Covid-19, et l’ordonnance interministérielle n°05 du 17 mars 2020 qui détermine, dans ses articles 3 et 4, que « le non-respect des mesures d’isolement et de quarantaine, ainsi que le refus de se soumettre à des examens médicaux et de laboratoires ainsi qu’à des traitements médicaux spécifiques, entraînent des sanctions fondées sur les articles 268 et 330 du code pénal brésilien ».
Le document ajoute que « c’est précisément le président de la République brésilienne qui incite les gens à circuler normalement dans les rues, à retourner à l’école et à reprendre leurs activités professionnelles. La confusion créée est absurde, car il désobéit lui-même aux directives mêmes de son propre gouvernement ».
Face à cela, les membres de l’Association soulignent que le chef de l’exécutif méprise les grandes autorités scientifiques qui prescrivent une stratégie de guerre pour réduire les effets de la pandémie. Le document précise que « Le président du Brésil se fait le porte-parole d’hommes d’affaires sans scrupules et refuse d’adopter la norme mondiale d’isolement social. Il n’agit pas en faveur de la stratégie d’aplanissement de la courbe de contagion et contribue à l’expansion de la contagion, ce qui entraînera fatalement l’effondrement du système de santé au Brésil ».
Cour Pénal Internationale
Le Statut de Rome (décret 4.388/2002) régit le travail de la CPI (Cour pénale internationale) et a été inclus dans le système juridique brésilien après approbation par le Congrès national. En adoptant cette norme dans sa juridiction, le Brésil accepte le principe qu’il existe des crimes qui touchent directement des milliers de personnes dans le monde et qui choquent profondément l’humanité.
L’article 27-1 du Statut de Rome dit que le fait de bénéficier d’une immunité n’exonère pas le président brésilien en cas de responsabilité pénale, ni ne constitue un motif de réduction de la peine. L’immunité découlant de la fonction n’empêche pas non plus la CPI d’exercer sa juridiction sur le président brésilien.
Le Brésil a non seulement signé et ratifié le statut, mais a également inclus le § 4, à l’article 5 de la Constitution fédérale de 1988, reconnaissant de fait l’allégeance du Brésil à la juridiction de la CPI.
Ainsi, l’ABJD déclare qu’il n’y a aucun doute sur la légitimité et la compétence de la CPI pour étudier cette plainte. En outre, l’association expose que le ministère public fédéral du Brésil a déjà essayé de faire en sorte que le procureur général de la République - la seule autorité qui puisse poursuivre le président de la République au Brésil - s’assure que Bolsonaro ne commette plus d’actions qui mettent la population en danger face à une grave pandémie, mais cette requête a été sommairement enterrée.
« L’internationalisation de cette question ainsi qu’une déclaration de la CPI sont urgentes et nécessaires. Nous ne pouvons admettre ce qui se passe au Brésil, à savoir l’impunité totale de Jair Bolsonaro qui conduit son pays vers une crise humanitaire relevant du crime contre l’humanité », conclut le document.