L’APIB dénonce Bolsonaro devant la CPI, à La Haye, pour génocide autochtone

 | Par APIB
Campement Terre Libre
Midia Ninja

L’Articulation des peuples autochtones du Brésil (Apib) a déposé, ce lundi (9), une déclaration devant la Cour pénale internationale (CPI) pour dénoncer le gouvernement de Bolsonaro pour génocide. En cette date qui marque la Journée internationale des peuples autochtones, l’organisation demande au procureur de la Cour d’examiner les crimes perpétrés contre les peuples autochtones par le président Jair Bolsonaro depuis le début de son mandat, en janvier 2019, avec une attention particulière sur la période de la pandémie Covid-19.

Sur la base des précédents de la CPI, l’Apib demande une enquête pour crimes contre l’humanité (article 7. b, h. k du Statut de Rome - extermination, persécution et autres actes inhumains) et génocide (art. 6. B et c du Statut de Rome - causer des dommages physiques et mentaux graves et infliger délibérément des conditions visant à la destruction des peuples autochtones). Pour la première fois dans l’histoire, des peuples autochtones se présentent devant la CPI, avec le soutien d’avocats autochtones, pour se défendre contre ces crimes.

La déclaration est composée de plusieurs plaintes de dirigeants et d’organisations autochtones, de documents officiels, de recherches universitaires et de notes techniques, arrivant à prouver la planification et l’exécution d’une politique anti-autochone explicite, systématique et intentionnelle dirigée par Bolsonaro.

« Nous pensons qu’il y a des actes en cours au Brésil qui constituent des crimes contre l’humanité, un génocide et un écocide. Étant donné l’incapacité du système judiciaire brésilien à enquêter, poursuivre et juger ces conduites, nous les dénonçons à la communauté internationale, à travers la Cour pénale internationale », souligne Eloy Terena, coordinateur juridique de l’Apib.

Selon un extrait de la communication, « le démantèlement des structures publiques de protection sociale et environnementale, ainsi que de celles destinées à protéger les peuples autochtones, a entraîné l’escalade des invasions sur les terres indigènes, la déforestation et les incendies dans les biomes brésiliens, ainsi que l’augmentation de l’exploitation minière illégale dans les territoires. »

Pour l’APIB, les attaques contre les peuples autochtones et leurs territoires ont été encouragées par Bolsonaro à plusieurs reprises au cours de son mandat. Les faits qui prouvent le projet anti-autochtone du gouvernement fédéral vont du refus explicite de délimiter de nouvelles terres, en passant par des projets de loi, des décrets et des ordonnances qui tentent de légaliser les activités invasives, stimulant les conflits.

« L’Apib continuera à défendre le droit des peuples autochtones à exister dans leur diversité. Nous sommes des peuples originaires et nous ne nous rendrons pas à l’extermination », souligne Eloy, l’un des huit avocats autochtones qui ont signé la déclaration.

La déclaration de plainte envoyée à la CPI a été soutenue par le Collectif de plaidoyer sur les droits de l’homme - CADHu et la Commission Arns, qui a déposé, en 2019, une autre déclaration au bureau du procureur de la CPI contre Bolsonaro, actuellement en cours d’examen à la cour.

Août autochtone

« Nous nous battons chaque jour depuis des centaines d’années pour assurer notre existence et aujourd’hui, notre lutte pour les droits est mondiale. Les solutions pour ce monde malade viennent des peuples autochtones et nous ne resterons jamais silencieux face à la violence que nous subissons. Nous avons envoyé ce communiqué à la Cour pénale internationale car nous ne pouvons pas ne pas dénoncer la politique anti-autochtone de Bolsonaro. Il doit payer pour toute la violence et la destruction qu’il mène », déclare la coordinatrice exécutive de l’Apib, Sonia Guajajara.

Selon la coordinatrice, le mois d’août sera marqué par les mobilisations des peuples autochtones qui luttent pour leurs droits. Elle met en avant le campement « Lutte pour la vie », prévu entre le 22 et le 28 août, à Brasília. « Nous occuperons une fois de plus la capitale fédérale pour empêcher les reculs contre les droits de nos peuples », renforce Sonia.

« Nous alertons la Cour pénale internationale sur l’escalade autoritaire en cours au Brésil. L’environnement démocratique est en danger », déclare Dinamam Tuxá, coordinateur exécutif de l’Apib, rappelant les projets de loi qui sont en cours d’analyse par le Congrès national brésilien et qui représentent de sérieuses menaces pour les droits des autochtones, ainsi que le jugement de la Cour suprême (STF) sur le Seuil Temporel, qui peut définir l’avenir des peuples autochtones.

« Nous appelons à l’action à Brasília, en pleine pandémie, car aujourd’hui, l’agenda anti-autochtone du gouvernement fédéral représente une menace plus mortelle que le virus Covid-19. La vie des peuples autochtones est liée à leurs territoires et nos vies sont menacées. Nous serons mobilisés dans les communautés, dans les villes, à Brasília et au tribunal de La Haye pour demander des comptes à Bolsonaro et lutter pour nos droits », souligne Tuxá.

« Les peuples autochtones resteront vigilants, comme ils l’ont toujours fait. Il est du devoir du gouvernement fédéral brésilien de les respecter, en tant qu’expression fondatrice d’un État de droit constitutionnel », souligne un extrait du document envoyé à la CPI.

FAITS MARQUANTS

  • Le 19 novembre 2019, le Collectif de plaidoyer sur les droits humains - CADHu et la Commission Arns ont saisi le Procureur de la Cour Pénale Internantionale d’une plainte pour génocide et pour crimes contre l’humanité perpétrés par Jair Bolsonaro contre les peuples autochtones.
  • Au cours du second semestre 2020, l’Apib et la Clinique de contentieux stratégique en droits de l’homme de la Fondation Getúlio Vargas, à São Paulo, ont organisé des ateliers avec des avocats, des dirigeants, des étudiants, des experts et des partenaires de l’Apib sur la compétence de la CPI.
  • Peu de temps après, l’APIB a lancé un appel aux dirigeants et aux organisations de base pour envoyer des plaintes pour violation des droits, notamment dans le contexte de la pandémie. Ces rapports ont été largement intégrés dans la déclaration à la CPI.
  • Les réunions ont abordé des questions telles que la compétence pénale internationale et ses critiques, les crimes relevant du Statut de Rome, la procédure devant la CPI, le rôle des victimes dans la construction des dossiers, la recevabilité et l’agenda du Bureau du Procureur.
  • En décembre 2020, le bureau du procureur de la CPI a informé le Collectif de plaidoyer sur les droits de l’homme - CADHu et la Commission Arns que la communication envoyée en novembre 2019 était en cours d’évaluation formelle.
  • Au cours du premier semestre 2021, sur la base des ateliers organisés en 2020, l’APIB a commencé à recueillir des témoignages et des données pertinentes sur l’impact des actions de Jair Bolsonaro sur différentes communautés autochtones du pays.
  • Les rapports émis directement par les peuples autochtones affectés, les documents officiels, les recherches académiques et les notes techniques intègrent les preuves pour soutenir la déclaration présentée par l’Apib le 9 août, devant la CPI, en association avec le Collectif de plaidoyer sur les droits humains - CADHu et Comission Arns.
  • Le document compte 86 pages et décrit des faits concrets, qui sont organisés en :
  1. Une chronologie des attaques de Bolsonaro contre les peuples autochtones, ce qui inclut la destruction des infrastructures publiques pour garantir les droits autochtones et socio-environnementaux, à travers des actes administratifs, normatifs, discours, réunions et projets, directement ou indirectement réalisés par le président Jair Bolsonaro ;
  2. La description des principales conséquences de la destruction des infrastructures publiques pour garantir les droits autochtones et socio-environnementaux : l’invasion et la dépossession des terres autochtones ; la déforestation ; l’exploitation minière dans les territoires et l’impact de la pandémie de Covid-19 sur les peuples autochtones ;
  3. Un rapport sur l’impact des invasions, de la déforestation, de l’exploitation minière dans les territoires autochtones et de la propagation de la pandémie de Covid-19 sur les peuples autochtones isolés ou ayant eu des contacts récents et sur les peuples Munduruku, les peuples autochtones qui vivent dans le TI Yanomami, les Guarani-Mbya, Kaingang, les Guarani-Kaiowá, les Tikuna, Kokama, les Guajajara et les Terena.
  • L’APIB apporte à la juridiction pénale internationale la voix et l’interprétation des peuples autochtones sur les crimes dont ils ont été victimes, un fait qui est historique en soi.

Voir en ligne : APIB denuncia Bolsonaro, em Haia, por genocídio indígena

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