Tout le monde sait déjà que M. Bolsonaro, l’homme qui occupe le poste de Président de la République du Brésil, est une source de conflits. Les impolitesses commises contre le Président Macron et sa femme [1], les railleries contre les autres dirigeants et institutions à l’échelle mondiale largement diffusé par la presse des divers pays [2] mais aussi le soutien apporté à Donald Trump [3] - une personnalité considérée comme agressive et intransigeante -, sont le reflet d’un même comportement cohérent au sein d’un esprit malade. Ce sont des attitudes de quelqu’un qui se nourrit de conflits. Cependant, ce qui n’est pas assez souligné dans la presse étrangère, c’est la capacité du Président Bolsonaro, à déranger la vie institutionnelle du pays par le biais d’une stratégie dangereusement efficace, c’est-à-dire, en manipulant les personnes contre des institutions.
Dans les années 1980, M. Bolsonaro a été expulsé de l’armée brésilienne lorsqu’il occupait les fonctions de capitaine. En effet, il avait planifié une attaque terroriste en utilisant des explosifs contre un bâtiment militaire afin de revendiquer un meilleur salaire [4]. Malgré cette condamnation et l’expulsion qui s’en est suivie, M. Bolsonaro a réussi à se faire élire président trente ans plus tard en s’autoproclamant capitaine des Forces Armées brésiliennes. Ce passé aide à illustrer le type d’attitudes du chef d’État brésilien à propos des institutions qui ne manque pas d’utiliser des moyens radicaux face à toute impasse.
Depuis son élection, le Président ne cesse de complimenter les différents types de police surtout les officiers subalternes. À chaque occasion, M. Bolsonaro se fait présent aux cérémonies d’obtention du diplôme de soldat et prononce souvent des discours contre la presse professionnelle et les institutions comme la Cour Suprême ou la Chambre des Députés [5]. Il prépare de cette façon le chemin pour un coup d’État ou pour une guerre civile sans contact direct avec les officiers de haut rang.
Aujourd’hui, beaucoup de politiciens, journalistes et juristes parlent d’impeachment contre le président Bolsonaro suite à un ensemble de crimes qu’il a commis. Nous pouvons citer par exemple : l’ingérence au sein des enquêtes policières impliquant son fils, les attaques contre les institutions, la négligence de l’administration de la pandémie, entre autres. Quand il entend le mot « impeachment », M. Boslonaro répond : « seulement Dieu me tire d’ici ! » [6]. En même temps, des vidéos et des fake news qui le défendent et font de lui un messie contre les démons et les fantômes comme la Chine, la Gauche, la presse, la Cour Suprême, etc., circulent par WhatsApp en suscitant de vives réactions de ses partisans comprenant d’innombrables policiers. Il est clair que le Président a en sa faveur l’appui d’une moyenne fixe de presque 30% [7] de peuple brésilien. Son vrai pari est la formation d’une armée privée avec ceux qui portent des uniformes.
Pourquoi les policiers s’identifient-ils au Président ? Les policiers au Brésil ont toujours été extrêmement désireux d’un message qui les inclut. En effet, la profession a connu des années de précarité ajouté à des dénonciations d’abus et d’harcèlements par la presse et par les universités. La corporation a une image d’elle-même dévalorisée dont le travail n’était reconnu que par quelques programmes de télévision qui exposent leur vie entre chasses aux bandits sous un explicite point de vue de droite [8]. M. Bolsonaro est apparu comme le meilleur interprète de cet imaginaire. Il semble les comprendre mieux que les autres politiciens et parle leur langage. Il transforme les policiers en héros. La fidélité de ces hommes et femmes est donc liée par des éléments esthétiques d’identification avec sa mentalité profonde et ils sont décorés par un sentiment de gratitude. En bref, c’est quelque chose de difficile à défaire.
Impeachment, coup d’État ou guerre civile ? Rien n’est sûr. Pendant ce temps, nous voyons le nombre de morts de Covid-19 dépasser deux-cent cinq mil, nous sommes témoins de la crise engendrée par le manque d’oxygène à Manaus et nous écoutons Jair Bolsonaro dire que ceux ne sont pas ses problèmes. En étant attentif aux courants d’opinions, il est clair que beaucoup de policiers de différents grades et de tout le pays, attendent les ordres de leur capitaine. Nous vivons l’un des moments les plus dangereux de notre histoire nationale.