La cause autochtone au sein du nouveau gouvernement : a quoi faut-il s’attendre ?

 | Par CIMI, Roberto Liebgott

Dès sa campagne électorale, Luiz Inácio Lula da Silva a indiqué que la question autochtone aurait une place d’importance dans son gouvernement. Il a promis un ministère et en a créé un - le ministère des Peuples autochtones (MPI) - nommant ministre la députée fédérale élue de São Paulo, Sônia Guajajara. Par ailleurs, le gouvernement a nommé Joênia Wapichana, députée fédérale de Roraima, de 2019 à 2023, à la présidence de la Fondation nationale des peuples autochtones (FUNAI).

Tant au sein du MPI que de la FUNAI, les fonctions et les postes de direction seront occupés par des autochtones connus pour leur engagement dans les luttes pour la défense des droits constitutionnels de leurs peuples.

Dans le cadre de la politique de santé autochtone, qui est gérée par le Secrétariat spécial de la santé autochtone (SESAI), Weibe Tapeba a été nommé et investi en tant que secrétaire exécutif. Il est important de souligner que le SESAI est responsable de la gestion de la politique à mettre en œuvre au sein d’un sous-système différencié, dont les piliers sont les 34 Districts spécifiques à la santé autochtones (DSEI).

En ce qui concerne la politique d’enseignement scolaire autochtone, les gouvernements démocratiques précédents avaient établi que l’enseignement scolaire devait être dispensé en conformité avec les territoires ethno-éducatifs. Cette proposition ne s’est toutefois pas avérée efficace au fil des ans. En d’autres termes, le ministère de l’éducation (MEC) et les départements de l’éducation des États n’ont pas respecté ni même reconnu cette proposition. L’enseignement scolaire a été laissé aux gouvernements et administrations des États, qui n’accordaient pas de priorité à une éducation différenciée.

En ce début de gouvernement, il y a des indications de dialogue pour la mise en œuvre d’une politique qui réponde aux déterminations constitutionnelles établies dans les articles 231 et 232 de la Constitution fédérale de 1988.

Le Conseil national de la politique autochtone (CNPI) sera rétabli. Il aura pour fonction de discuter, de réfléchir et de proposer des mesures et des actions visant à garantir les droits des peuples dans le cadre des politiques publiques, de la démarcation des terres, de la protection et de l’inspection des territoires et de la lutte contre les invasions et la dévastation environnementale.

Bien que tout soit en train d’être restructuré, que l’on reprenne les politiques et que l’on en planifie d’autres à mettre en œuvre, la pratique des crimes, les invasions de terres et les formes les plus variées de violence n’ont pas cessé et ne cesseront pas si des mesures fermes ne sont pas adoptées et appliquées contre les criminels.

Par conséquent, les défis à relever pour la mise en œuvre d’une véritable politique autochtone, surtout après quatre années de dévastation et de démantèlement de l’État, sont monumentaux et variés. Il est possible de les décliner en cinq axes majeurs, que nous allons détailler ci-dessous.

1.Les défis de la faim

Le gouvernement Lula doit immédiatement, et de manière urgente, s’attaquer au fléau de la faim. Tant qu’il n’y aura pas de démarcations, il n’y aura pas non plus de possibilités de suspendre les opérations de livraison de nourriture aux communautés dépossédées, comme dans le cas des campements de bord de route, dans des États tels que le Mato Grosso do Sul, le Paraná et le Rio Grande do Sul.

2. les défis de la démarcation des terres

Pour surmonter ce défi, la première étape est liée à l’arrêt du Tribunal supérieur fédéral (STF) du recours extraordinaire 1.017.365, caractérisé de répercussion générale. Cela signifie que la décision prise par cet arrêt entraînera des conséquences pour tous les peuples autochtones du Brésil.

En ce sens, le gouvernement doit s’inscrire, par le biais du MPI et de la FUNAI, en défense de la Constitution fédérale, articles 231 et 232, en reconnaissant les droits originels des peuples sur leurs terres et en expliquant au pouvoir judiciaire que cela va à l’encontre de la thèse du seuil temporel, en discussion dans ce processus.

Le MPI et la FUNAI doivent sans attendre finaliser toutes les démarcations dont les procédures sont arrivées à terme et sans embargo judiciaire. Il existe des dizaines de procédures qui doivent être priorisées, garantissant ainsi la sécurité juridique et l’accès à la terre et à ses fruits.

La FUNAI doit reprendre les études détaillées d’identification et de démarcation qui sont paralysées depuis des années. Elle doit également réaliser une enquête sur les demandes de démarcation et créer des groupes de travail pour réaliser les études, conformément aux dispositions de l’ordonnance 14 de 1996 et du décret 1775 de 1996.

3. Le défis de la violence

Le processus de violence à l’encontre des peuples et de leurs territoires doit immédiatement être combattu. Le gouvernement doit renforcer les structures d’inspection des terres, combattre les envahisseurs et les tenir pénalement responsables. Il est urgent d’expulser les envahisseurs des terres autochtones Yanomami, ce qui, en raison de la gravité de la situation et de la profondeur des dommages causés, constitue un symbole du démantèlement des politiques de protection de l’environnement et du territoire menées par le gouvernement d’extrême droite.

Au mois de janvier, des autochtones ont été assassinés du Sud au Nord du pays. Hier, 17 janvier, deux jeunes Pataxó ont été assassinés à Bahia et un adulte Kaingang dans le Rio Grande do Sul. En d’autres termes, la soif de sang autochtone ne cesse de croître car les ennemis n’ont pas disparu ; ils continuent d’agir et de tuer. Les invasions et la dégradation des terres n’ont pas cessé.

Il faut aller au-delà des annonces de réquisition des actions de l’État. Le gouvernement fédéral doit envoyer des représentants dans les zones de conflit, afin qu’ils puissent exiger une action efficace contre ces crimes et apporter leur solidarité aux communautés touchées.

4. Les défis de l’usufruit exclusif des terres par les peuples autochtones

Il est nécessaire d’instaurer un dialogue et de créer des mécanismes pour leur garantir l’usufruit exclusif de leurs terres. Il est nécessaire de rompre avec les pratiques d’usurpation, comme la location de zones délimitées. En même temps, il est nécessaire de discuter des formes d’utilisation et de planifier, avec les peuples autochtones et leurs communautés, des alternatives économiques qui leur assurent une alimentation saine et des revenus.

5. Les défis des politiques d’aide sociale

Les politiques d’assistance doivent être reprises avec une large participation des peuples et de leurs dirigeants. Il est nécessaire de rediscuter des actions et des services dans les domaines de la santé, de l’éducation, du logement et des économies autochtones. Le contrôle social, dans le cadre de ces politiques, doit être complet, continu et effectivement participatif.

Le gouvernement fédéral, depuis ses structures de planification, de création et de mise en œuvre de politiques pour les peuples autochtones, aura besoin, plus que de discours, de décorations et d’ornements, de s’imposer pour mettre fin à l’intolérance et à la négation des droits constitutionnels des peuples autochtones.

Voir en ligne : A causa indígena no novo governo : o que esperar ?

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