Ce document a été élaboré dans le cadre de la 3ème Evaluation périodique de l’État brésilien devant le Comité contre la Discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), conformément à l’obligation de l’État de soumettre des rapports périodiques lors de la ratification de la Convention CEDAW en 2002.
La situation des femmes vivant dans des contextes de rue représente l’une des violations les plus flagrantes des dispositions de la CEDAW par l’État brésilien, nécessitant un rapport spécifique sur le sujet dans le cadre de cette évaluation. Bien qu’elles ne représentent que 15% de la population vivant dans la rue, les femmes ont été victimes de 40% des violations signalées par les autorités publiques, dans un contexte probable de sous-signalement. Le nombre de femmes en situation de rue a considérablement augmenté pendant et après la pandémie de COVID-19 et, même après la fin de la pandémie, ce pourcentage élevé de femmes reste dans les rues.
Les multiples intersections, incluant la race, l’ethnicité, la situation socio-économique, l’usage de drogues, le faible niveau d’éducation et de formation professionnelle, exposent ces femmes à un niveau extrême de vulnérabilité. Les diverses crises engendrées par la pandémie ont aggravé la situation des femmes vivant dans la rue.
Les données disponibles sur les femmes en situation de rue sont fragmentées, dispersées et insuffisantes pour élaborer une politique publique efficace, avec une claire orientation de genre. Le plan actuel d’attention aux personnes vivant dans la rue ne contient que des mentions ponctuelles de la question de genre. La Cour Suprême, dans une décision importante concernant la population de rue, aborde les droits protégés par la CEDAW de manière purement déclarative, sans déterminer de mesures spécifiques pour mettre en œuvre la Convention au niveau national.
Recommandations suggérées :
- Réalisation d’un recensement national effectif de la population en situation de rue, avec des données ventilées par genre et par race, selon une méthodologie éprouvée et appliquée par l’Institut Brésilien de Géographie et de Statistiques (IBGE) ;
- Révision des instruments et politiques relevant de la compétence du Gouvernement fédéral concernant les personnes en situation de rue, en incluant obligatoirement une perspective de genre ;
- Élaboration des politiques et des actions par le ministère de la Santé visant à assurer la santé intégrale des femmes et de la population LGBTQIA+ vivant en situation de rue, y compris leurs enfants et les personnes à leur charge ;
- Élaboration d’un plan d’accès à la justice pour les femmes vivant en situation de rue, en tenant compte des frais officiels et des coûts judiciaires et en garantissant que l’absence d’adresse fixe ne soit pas un obstacle à l’exercice de ce droit ;
- Révision du vaste diagnostic élaboré par le ministère des Droits humains et de la Citoyenneté, réalisé en 2022 et publié en 2023, afin d’approfondir la connaissance des conditions de vie et des violences subies par les femmes en situation de rue ;
- Élaboration d’une campagne de sensibilisation par le ministère de la Femme, destinée aux femmes chefs de famille sans abri et sans protection sociale, cibles de discriminations intersectionnelles, en concertation avec les mouvements de population de rue, la société civile et la communauté académique ;
- Élaboration par le Conseil National de Justice d’une recommandation incluant une perspective de genre dans tous les cas concernant la population de rue, à fin de réparer les droits violés, individuellement et collectivement, compte tenu de la négligence historique de l’État.
