Lettre à la Terre Mère

 | Par APIB

Nous sommes là, nous y sommes pour toi et nous ne faisons qu’un !

Chère Pacha Mama, généreuse Terre Mère,

Nous sommes réunis ici pour réaffirmer une fois encore notre engagement et notre volonté de te défendre jusqu’à notre dernier souffle.

En cette Journée de la Terre, célébrée chaque 22 avril, nous nous rappelons ô combien tu es généreuse, ô combien tu prodigues en abondance et ô combien tu offres de cadeaux à tes fils et à tes filles.

Nous parlons au nom de celles et ceux qui te comprennent comme un écosystème intégré, dans lequel les dimensions physique, biologique, spirituelle et énergétique de nos existences dansent en harmonie, permettant à une infinité d’êtres de profiter de ton œuvre.

Nous parlons au nom de celles et ceux qui ont un lien plus intime avec toi - les peuples autochtones, les ribeirinhos, les quilombolas, les assentados [1], celles et ceux qui sont nés et ont grandi au sein de populations traditionnelles - et qui sont habitués aux cycles des semailles et des récoltes qui exigent de nous engagement, travail ardu, respect de la nature et sagesse.

Nous sommes actuellement confrontés à un immense défi - une pandémie de proportion mondiale, cause des négligences et prétentions avec lesquelles nous traitons la création.

Cette pandémie emporte nos êtres chers, mais pas seulement : elle modifie notre économie, notre politique et le fonctionnement de la société que nous avons choisi d’être il y a quelques siècles.

Nous avons déjà compris que le capitalisme n’apporte pas les réponses que nous voulons, ni les solutions dont nous avons besoin - et qu’il doit donc être remplacé par une autre façon d’envisager l’existence.

Nous creusons pour trouver de l’or et des minéraux, détruisant tout ce qui nous entoure comme s’il n’y avait pas de lendemain - et il y en a toujours un ;

Nous brûlons les troncs, les branches et les racines pour ne laisser que des cendres et des vestiges carbonisés là où il y avait autrefois vie et couleur ;

Nous laissons envahir et vandaliser nos sanctuaires naturels, provoquant de profondes blessures en ta chair ;

Nous polluons les eaux, manquant de respect aux rivières, aux lacs, aux mers et aux océans, ainsi qu’à tous les êtres qui en dépendent ;

Nous exterminons les pollinisateurs et rejetons dans l’air des gaz qui condamnent toute vie.

Les signes de notre incurie sont évidents : le climat a changé, l’eau manque à beaucoup, en de nombreux endroits respirer devient difficile, les fruits se font rares et nombreux sont celles et ceux qui parmi nous doivent se déplacer en quête de nourriture et de meilleures conditions de vie ;

Mais nous te demandons, généreuse Mère guérisseuse, de ne pas nous abandonner.

Pardonne à celles et ceux qui n’ont pas encore compris la valeur du féminin sacré, l’énergie des femmes et les contributions qu’elles apportent à nos luttes et à nos vies ;

Pardonne à celles et ceux qui prônent encore la suprématie de l’homme sur toutes les autres formes de vie, sans comprendre que chaque animal, chaque plante, chaque rivière ou cascade, chaque vallée ou montagne, chaque forêt ou savane, a sa raison d’être ;

Pardonne à celles et ceux de tes enfants qui n’ont toujours pas compris qu’ensemble nous formons un tout qui est relié. Pardonne à celles et ceux de tes enfants qui n’ont pas encore compris que la vie est faite de cycles, qu’il n’y a pas de bonne fortune sans son prix et qu’il n’y a pas de période d’abondance sans période de pénurie. C’est pour cela que l’équilibre est fondamental.

En cet instant et par cette lettre :

Nous te promettons, avec la force de nos maraca, génipapo et urucum, de lutter entièrement pour la vie ; en faisant de nos corps les arbres de nos sols, les dernières frontières de la lutte pour la vie.

Mère bien-aimée,

Accueille les demandes de celles et ceux de tes enfants qui savent que, sans toi, rien ne germe et rien ne pousse.

Aide-nous à concevoir une pensée collective décoloniale, plus proche de tes besoins, plus horizontale dans ses visions, qui valorise dûment toutes tes manifestations.

Toi seule connais l’avenir que nous méritons.

Mais nous avons confiance en ton amour et en ta générosité pour nous guider vers une transformation réparatrice, qui atténue la souffrance et guérit les blessures.

Nous faisons appel à ta compassion et demandons encore un peu de patience.

Nous sommes là, nous y sommes pour toi et nous ne faisons qu’un !

Voir en ligne : Carta à Mãe Terra

[1NdT Ribeirinhos ; quilombolas ; assentados : ce sont des identités concernant un vaste ensemble de situations régionales et culturelles brésiliennes.

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