Réglementation sur l’importation des produits à risque forestier, une proposition pas à l’hauteur des enjeux globaux Communiqué de l’APIB sur la projet de loi au Parlement Européen

 | Par APIB

La loi FERC, aussi connue comme réglementation contre la déforestation importée, va inclure des mesures qui exigent des entreprises productrices de biens destinés au marché mondial le respect de la législation internationale sur les droits humains en général, par conséquent, sur les droits des peuples autochtones. Les membres du Parlement Européen, réunis le 13 septembre 2022 à Strasbourg ont voté la proposition de loi avec plusieurs suggestions de modification. Parmi elles, l’obligation de respect de la Convention nº 169 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), sur la consultation des peuples autochtones. Aucun produit ne sera importé dans l’Union Européen sans que l’entreprise responsable n’ait le consentement des peuples autochtones affectés par une activité productive proche de leurs terres.

Une autre proposition acceptée est la révision annuelle de la réglementation, à chaque année plutôt que tous les deux ans comme il était prévu d’abord. Les député·es n’ont pas cédé aux pressions des lobbies et ont inclus le cuir dans le groupe de marchandises régulées par la loi contre la déforestation importée. Cela constitue une grande victoire, car le cuir est un des principaux produits potentiellement responsables de la déforestation importé par l’Union Européen. Au-delà des produits considérés dès le départ par la proposition de loi – comme la viande de bœuf, le huile de palme, le soja, le bois, le café et les produits dérivés (tel que le chocolat ou les meubles)-, la réglementation inclut également la viande de porc, de brebis, de chèvre, de volaille, le maïs, le caoutchouc et les produits dérivés du papier.

De même, il a été reconnu le rôle essentiel joué par les financeurs des chaînes de production des filières agro-alimentaires et extractivistes, ainsi que le besoin de régulation pour que les banques et investisseurs européens ne financent pas la déforestation ou la violation des droits humains.

Le Parlement Européen propose, en outre, la création d’un programme de coopération entre les pays pour appliquer des mesures globales et efficaces contre la déforestation. Les parlementaires sont conscients que la création d’une loi contre l’importation de produits à risque forestier dans l’Union Européen ne peut être la seule solution pour finir avec la déforestation : ces produits peuvent être vendus sur d’autres marchés. Aussi, ils ont proposé que la Commission Européen soit responsable pour l’élaboration d’une cartographie présentant les pays à risque de déforestation, afin de rendre possible la construction de projets internationaux de coopération. Les parlementaires ont insisté sur le besoin de bonnes pratiques de gouvernement dans les pays producteurs, ainsi que le respect des droits des peuples autochtones et autres populations traditionnelles qui vivent en interdépendance avec la nature.

Le Parlement a demandé une assistance pour que les petits producteurs puissent respecter les règles de la loi FERC, comme la traçabilité par géolocalisation. Il est juste et nécessaire de construire des programmes en partenariat et coopération pour aider les petits producteurs à faire une transition à l’agriculture et l’élevage durables.

Par ailleurs, la législation inclut l’accès pour des institutions de justice indépendantes et impartiales au contrôle des impacts de déforestation provoqués par la production de produits destinés au marché mondial. Néanmoins, les entreprises ne seront pas mises en responsabilité par la loi pénale ou criminelle, mais seulement administrative, selon les dispositions de la loi FERC. Au-delà, les parlementaires ont rejeté la demande de mécanismes de compensation pour les peuples autochtones touchés par les chaînes de production de ces filières.

« Il faut que cette réglementation soit plus ferme quant à la traçabilité des produits. Nous, peuples autochtones, ne voulons pas une compensation, mais des dispositions pour éviter les impacts et, dans les cas d’illégalités constatées, que les entreprises responsables soient punies pénalement, pas uniquement avec des mesures administratives », explique Dinamam Tuxá, coordinateur de l’APIB.

Une autre demande de l’APIB qui est restée hors de la réglementation est la protection de tous les écosystèmes, indépendamment de la définition de forêts de la FAO considérée par la loi FERC. « Au-delà des considérations incluses dans cette loi, nous voudrions qu’elle soit beaucoup plus ambitieuse, principalement dans la reconnaissance de tous les écosystèmes, pour protéger tous les territoires qui sont sous menaces de destructions occasionnées par des activités productives », affirme Tuxá. « Nous pensons que le fait de ne pas inclure tous les écosystèmes dans cette loi va augmenter la pression de la déforestation dans les terres situées en dehors de l’Amazonie. Cela nous inquiète parce qu’il s’agit de terres productives qui rencontrent déjà des situations de conflit et parce que, dans plusieurs régions du Brésil, les aires d’agriculture et d’élevage ont très fortement avancé à l’intérieur des terres indigènes », ajouté Tuxá.

L’application de la loi contre la déforestation importée uniquement dans quelques biomes ouvre une brèche pour que les chaînes de production destructives se déplacent d’une région à une autre sans résoudre le problème. L’APIB insiste sur le besoin de révision de ce point dans les prochains mois de débats, avant l’approbation finale du texte de loi.

Le résultat du vote a été le dernier pas vers l’élaboration du texte de loi, initialement présenté au Parlement Européen en novembre 2021. Toutefois, la réglementation peut encore être modifiée puisque commence le processus de négociation entre le Parlement Européen, le Conseil Européen et la Commission Européen. Ce processus, appelé « trilogues », prétend aboutir à une version définitive de la législation pour la fin 2022  ; les États membres pourront alors voter la loi pour qu’elle entre en vigueur.

Voir en ligne : Parlamento Europeu incluiu respeito aos direitos indígenas na votação da Lei anti-desmatamento, biomas não foram incluídos

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