Nous, les peuples autochtones, vivons dans un état de menace constante, qui nous oblige à une vigilance et une mobilisation permanentes. En ce moment, juin 2021, toujours sous les contraintes d’une pandémie dévastatrice qui est sur le point de faire 500 000 victimes au Brésil, dont plus de 1 110 de nos proches font partie, nous nous trouvons dans l’obligation d’intensifier nos luttes et d’amplifier notre voix de protestation pour défendre nos droits les plus fondamentaux : nos vies et nos territoires.
La lutte pour la vie nous a appelé, et nous sommes venus à Brasilia pour installer notre campement Levante pela Terra (Soulèvement pour la Terre) pour défendre nos droits, principalement territoriaux. Nous sommes revenus occuper les pelouses de la capitale fédérale après deux ans sans mobilisations en face à face, notamment le Campement Terre Libre (la plus grande assemblée des peuples autochtones du Brésil qui, en raison de la pandémie de Covid-19 s’est tenue virtuellement en 2020 et 2021).
Nos dirigeants, qui sont déjà complètement immunisés par le vaccin contre le nouveau coronavirus, se réunissent en ce moment pour faire résonner nos maracas et réaffirmer qu’au milieu de la plus grande urgence sanitaire et humanitaire de ces dernières années, les Vies Autochtones comptent.
Nous réaffirmons dans ce manifeste nos idéaux de lutte et déclarons notre ÉTAT PERMANENT DE MOBILISATION.
Pour l’interruption immédiate de toute mesure anti-autochtone au Congrès National !
- Le retrait permanent de l’ordre du jour de la Commission de Constitution et Justice de l’Assemblée Nationale et la mise au placard du Projet de Loi (PL) 490/2007, qui menace d’annuler les démarcations des terres autochtones ;
- Le retrait du PL 2633/2020, connu sous le nom de PL da Grilagem, car une fois approuvé, le projet amnistiera les accapareurs de terres et légalisera le vol de nos territoires, aggravant encore la violence à l’encontre des peuples autochtones ;
- Le retrait du PL 984/2019, qui prévoit la construction des routes dans le parc national d’Iguaçu et d’autres unités de conservation ;
- Le retrait du PDL 177/2021 qui autorise le Président de la République à abandonner la Convention 169 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), le seul traité international ratifié par le Brésil qui porte spécifiquement et intégralement sur les droits des peuples autochtones ;
- Le retrait du PL 191/2020 qui autorise l’exploitation des terres autochtones par de grands projets d’infrastructure et d’exploitation minière industrielle ;
- Le retrait du PL 3729/2004, qui détruit les procédures d’autorisation environnementale et entraîne des reculs importants en matière de protection de l’environnement et garantie des droits des populations affectées par la dégradation environnementale des projets d’infrastructure, tels que les barrages hydroélectriques.
Ces projets génocidaires et écocidaires utilisent la pandémie de Covid-19 comme un écran de fumée, augmentant la violence contre les peuples autochtones et les conflits dans nos territoires, y compris entre membres d’une même famille. Ces conflits sont alimentés par le gouvernement dans le but de diviser, d’affaiblir et de démobiliser nos peuples, nos organisations et nos dirigeants. Sachez que nous ne nous laisserons pas écraser par de telles stratégies !
Tribunal Suprême Fédéral : nos droits doivent être sauvegardés et protégés !
Le Tribunal Suprême Fédéral (STF) est en train de juger le cas de répercussion générale sur la démarcation des terres autochtones, le bien connu Appel Extraordinaire (RE) 1.017.365 lié au cas de la Terre Autochtone Xokleng-La Klanõ, du peuple Xokleng à Santa Catarina . Le statut de « répercussion générale » donné par le STF à l’affaire signifie que sa résolution servira de ligne directrice pour le gouvernement fédéral et toutes les instances du pouvoir judiciaire en ce qui concerne la démarcation des terres autochtones, en plus de servir à encadrer les propositions législatives qui traitent des droits territoriaux des peuples autochtones - comme le PL 490, qui ouvre les terres autochtones à l’exploitation prédatrice et rend, en pratique, les nouvelles démarcations irréalisables.
Ce jugement a été suspendu par l’intervention du ministre Alexandre Moraes. Le STF a le devoir de protéger notre droit constitutionnel à nos territoires ! Le jugement doit être repris !
En particulier en cette période d’attaques, la voix de la Cour suprême doit résonner fortement et garantir aux peuples Yanomami et Munduruku le retrait des envahisseurs de leurs terres. Cette même protection doit être étendue à cinq autres terres autochtones, qui font également l’objet de discussions au sein du STF : Tis Karipuna et Uru-Eu-Wau-Wau, dans le Rondonia, Kayapó et Trincheira-Bacajá, dans le Pará et Araribóia, dans le Maranhão.
Telle est la demande de l’Apib en ce moment, avec le sens de l’urgence, aux juges de la Cour suprême. Nous le faisons à travers ce document, à travers les voix de nos dirigeants, de nos territoires à travers le Brésil, et aussi rassemblés dans le campement Levante pela Terra à Brasilia. Nous le faisons également sur le plan judiciaire, dans le cadre de l’Action de non-conformité au précepte fondamental (ADPF) 709/2020, rédigée par l’Apib et diverses organisations nationales en solidarité avec les peuples autochtones. Cette ADPF est à l’ordre du jour du STF et devrait être débattue en séance plénière jusqu’au 18 juin.
Pour la vie et la continuité historique de nos peuples, dites au peuple d’avancer !
Soulèvement pour la Terre
- Apib – Articulação dos Indígenas do Brasil
Les organisations régionales de base de l’Apib :
- APOINME – Articulação dos Povos Indígenas do Nordeste, Minas Gerais e Espírito Santo
- ARPIN SUDESTE – Articulação dos Povos Indígenas do Sudeste
- ARPINSUL – Articulação dos Povos Indígenas do Sul
- ATY GUASU – Grande Assembléia do povo Guarani
- Comissão Guarani Yvyrupa
- Conselho do Povo Terena
- COIAB – Coordenação das Organizações Indígenas da Amazônia Brasileira